Les billets d’architecture de Donatienne : #3. Avenue Louise

L'Avenue Louise

Édifiée au cours du XIXème siècle pour relier le centre-ville de Bruxelles au bois de la Cambre, l’avenue Louise représente l’une des étapes majeures de l’impressionnant développement du paysage urbain de notre capitale. En 1830, le site allant de la « Grosse Tour » des anciens remparts jusqu’à la forêt de Soignes, offrait encore un cadre champêtre et vallonné, composé de jardins potagers et de champs, parsemé de quelques habitations et propriétés comme celles d’Eugène Defacqz ou de Charles Faider dont seul le nom des rues rappelle le souvenir. Bien que le plan d’ensemble d’extension et d’embellissement de l’agglomération bruxelloise ne se clarifiera qu’au cours des années 1860 avec les propositions de l’inspecteur voyer, Victor Besme, un premier lotissement à la porte Louise, du nom de la Reine des Belges, est créé dès 1838. Les principaux acteurs de ce projet, dont la rue principale est l’actuel goulet, sont Jean-Philippe De Joncker et Jean-Baptiste Jourdan. Après l’aménagement de ce premier segment ouvert à la circulation en 1843, les promoteurs projettent de continuer l’aventure en proposant au gouvernement, dès l’année suivante, de prolonger leur artère par une voie monumentale et de doter Bruxelles d’une élégante promenade menant jusqu’au bois, cette avancée de la forêt de Soignes qui sera aménagée en parc public. Mais le projet s’enlise et finit par leur échapper. En effet, il ne suffit pas de vaincre les difficultés techniques et financières -les considérables terrassements et l’acquisition des terrains- et d’évincer les projets concurrents. Il faut aussi convaincre l’État d’accorder un soutien financier et la commune d’Ixelles, qui voit d’un mauvais œil l’expropriation d’une large bande de son territoire en faveur de la Ville. Grâce entre autres à l’appui du futur « Roi urbaniste », Léopold II, la situation se dénoue, mais à charge de la Ville de Bruxelles d’exécuter les travaux à ses frais.

En 1866, après six années de périlleux travaux, le percement de l’avenue Louise est achevé et devient rapidement la promenade préférée des Bruxellois. Si cette longue et large artère de près de deux kilomètres et demi a été spécialement créée pour rejoindre directement le nouveau parc public, le beau monde se plaît à la parcourir à pied, à cheval ou en attelage et à s’y montrer. Il faut avouer que l’avenue actuelle n’a plus la même allure que celle d’autrefois, avec ses allées et contre-allées séparées par une double rangée d’arbres et agrémentées de bancs, de candélabres, d’aubettes, de parterres fleuris et de sculptures. La première ligne de tramways de la ville y est même inaugurée en 1869. Mais le tracé de l’avenue conduit aussi à l’urbanisation de ses abords avec la création du remarquable quartier des étangs d’Ixelles et le fameux jardin du Roi tandis que les rues adjacentes se lotissent de toute part. Ses maisons, construites de 1859 à 1914, reflètent le foisonnement des styles architecturaux de l’époque, la vie de ses habitants, pour la plupart de la haute bourgeoisie, et les activités de ses quelques établissements commémorent les années fastes de l’avenue. On y distingue fort heureusement encore une série de beaux hôtels particuliers comme les n°77 et 79 conçus par H. Beyaert et les n° 329 à 233 d’E. Janlet, d’influence encore néoclassique, l’hôtel Crabbe et sa terrasse de W. Janssens au n° 103, l’hôtel Peltzer au n°123 par V. Besme, les n° 342 et 344 de H. Maquet ou le n° 340 par Delune de tendance plus éclectique ainsi que les incontournables hôtels Solvay et Max Hallet Art nouveau de V. Horta aux n° 224 et 346 ou encore les n° 126, 208 ou 415 de style Beaux-Arts. 

Dès le début du XXème siècle, les premières transformations de l’avenue Louise apparaissent avec le percement de l’avenue Émile De Mot afin de rejoindre la plaine du Solbosch où se tient en 1910 une grande exposition universelle. C’est également de cette période que date l’élégante impasse privée du square du Bois dont les réalisations sont surtout confiées aux architectes L. Govaerts et P. Bonduelle. Mais à partir de 1930, cette artère entame sa progressive mutation avec tout d’abord l’apparition d’immeubles à appartements (aux n° 244 par J. Saintenoy ou 453 par S. Jasinski, et d’après-guerre aux  n° 440 par P. Viérin ou 271 par L.H. De Koninck) puis de bureaux (au n° 194 J.et Y. Obozinski). S’en suit l’amplification des commerces, restaurants et galeries d’art, l’emprise de la voiture et l’impact vers 1960 de l’arrivée des tours Generali, ITT et Blue Tower. Malgré ce changement de visage avec les années, cette évolution en fait aujourd’hui l’un des quartiers les plus prisés de la capitale en bien des domaines.

Un ouvrage à lire qui retrace de manière magistrale l’histoire de cette artère principale : Xavier Duquenne, L’Avenue Louise, Hayez, 2007.

Donatienne de Sejournet

Historienne de l’art et journaliste du patrimoine et de jardins

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